Tombstone, « the city too tough to die » ?
Rien que le nom, ça sent bon le western, les chevaux, la Remington, Kurt Russell et Val Kilmer avec des moustaches. Ici, c’est Tombstone, la ville qui incarne le far-west, « too tough to die » (trop dure pour mourir). Située au sud de l’Arizona, dans le Comté de Cochise, Tombstone est sortie de terre en 1879. Il fallait une raison : ce furent les mines d’argent. Mais privée d’eau, sans chemin de fer, Tombstone et ses habitants ont souffert.
C’est aussi et surtout le lieu de la fusillade d’Ok Corral, quand la fratrie Earp (Wyatt, Virgil, Morgan) et Doc Holliday ont mis une sévère dégelée aux frangins Mac Laury en 1881. Un pur morceau de far-west. Et je ne cachais pas mon impatience lorsqu’il a été question d’aller à sa rencontre lors de notre roadtrip 2013.
Nous venions de Bisbee, encore plus au sud, pour voir ce que Tombstone avait à nous offrir. La ville a deux grands points d’intérêt : le cimetière de Boothill et sa rue principale, Allen St.. En avant.
Boothill Graveyard
A l’entrée de la ville se trouve le cimetière de Boothill. Il y a beaucoup de cimetières portant ce nom aux Etats-Unis, mais celui-là est le plus connu. Pourquoi Boothill ? Car ceux qui y sont enterrés sont morts avec leurs bottes. Ambiance… Suicides, pendaison, fusillades, assassinats, maladies, accidents, noyades, explosions, empoissonnements : un bel échantillon de ce que pouvait être la vie (et la mort) à Tombstone à cette époque.
250 tombes se dressent dans ce petit cimetière du désert. 250 personnes décédées entre 1878 et 1883, à l’époque où il était le plus important de la ville. Tombé ensuite en déshérence, il a été repris en mains par des amoureux de Tombstone qui ont effectué un travail de fourmi pour restaurer et retracer l’histoire de chaque tombe. On retrouve ici quelques tombes célèbres, de par leur propriétaire (les frères Mc Laury, Billy Clanton) ou de par les épitaphes.
Quelques exemples :
> Lester Moore (sûrement la plus célèbre) : « Here Lies Lester Moore, Four Slugs from a .44. No Les, no more ». Traduction : « Ci-gît Lester Moore. Quatre bastos d’un calibre 44. Rien de plus, rien de moins (jeu de mots avec Les Moore) »
> Frank Bowles : « In memory of Frank Bowles, born Aug. 5, 1828, died Aug. 26, 1880. As you pass by, remember that as you are, so once was I, and as I am, you soon will be. Remember me. » Traduction : « En mémoire de Frank Bowles, né le 5 août 1828, mort le 26 août 1880. Alors que vous passez par là, souvenez-vous que tel que vous êtes, je l’étais un jour et tel que je suis, vous le serez bientôt. Souvenez-vous de moi ».
> George Johnson : qui a acheté naïvement un cheval volé. « Here lies George Johnson, Hanged by mistake, 1882. He was right, we was wrong, but we strung him up and now he’s gone. » Traduction : « Ci-gît George Johnson, pendu par erreur, 1882. Il avait raison, nous avions tort, mais nous l’avons pendu et maintenant il est mort ».
Il y a aussi des « tué par les indiens », « tué en jouant aux cartes » ou une tombe où il y a « deux Chinois ».
La visite du cimetière se fait en trente minutes. Ajoutez en quelques-unes pour la boutique de souvenirs (assez collector). Et après cette entrée en matière, on a mis le cap sur Tombstone.
Allen St., Tombstone
Nous voilà arrivés au centre-ville. Le temps de poser la voiture et c’est parti pour la découverte. C’est simple, la partie « historique » se limite à une rue, Allen Street, fermée aux voitures et où les calèches peuvent donc s’en donner à coeur joie. On attaque la visite par une grosse déception. Le lieu d’origine de la fusillade d’OK Corral est littéralement barricadé et il faut payer (10 $ par tête) pour voir une reconstitution (trois fois par jour : midi, 14h, 15h30). Sûrement bien pour les enfants. Moi, ça me gave. Ce qui m’énerve surtout, c’est de bloquer la vue. Oui, un coup d’oeil m’aurait suffi. Mais business is business…
Place alors au reste de la grande rue. Il faut bien avouer que la balade est agréable sur le plancher en bois et devant les échoppes et les saloons. Il y en a pour tous les goûts. Des figurants et figurantes, déguisés en cowboys ou en saloon girls, se promènent au milieu des touristes en tongs-marcel-casquette (2/3 pour moi), ce qui affecte légèrement l’immersion.
« The Bird Cage Theatre is the wildest, wickedest night spot between Basin Street and the Barbary Coast »
Mais le seul morceau d’histoire de la rue, le seul bâtiment original, est le Bird Cage Theatre, à l’extrémité nord-est de la partie piétonne. C’est ce qu’on appelle un « must see ». Si vous allez à Tombstone, allez au Bird Cage. Ce saloon-théâtre-salle de jeu a ouvert en 1881 (jusqu’en 1889) et baigne dans son jus depuis. C’était un lieu de débauche peu fréquentable (simplement 26 tués en huit ans, hein). En 1882, le New York Times en parlait ainsi : « The Bird Cage Theatre is the wildest, wickedest night spot between Basin Street and the Barbary Coast ». « Le BTC est l’endroit le plus sauvage, le plus diabolique, entre Basin street (New Orleans) et la Barbary Coast (San Francisco) ».
En dur, la façade est bien différente des autres. On entre et on se retrouve avec un sosie de « Christophe Les Mots Bleus » avec un stetson et une voix d’outre-tombe (et un accent terrible). Rien que le hall est magnifique (cherchez les impacts de balle). Dix dollars par tête pour entrer dans ce théâtre que l’on dit hanté (ben oui, 26 macabés, c’est une bonne base). Une première salle avec le théâtre et les loges. Puis les coulisses avant de descendre à la salle de jeu. Ce n’est pas immense mais l’endroit, poussiéreux, regorge de petits objets (des fois, on se demande ce qu’ils font là) et de petites histoires. Vraiment un bon moment… qui se termine comme toujours par (wait for it…) un gift shop.
En dehors du Bird Cage, je dois bien avouer que j’ai été déçu. Vous allez dire que j’ai survécu sans mal au Wall Drug ou au Palais de maïs de Mitchell (Dakota du Sud). Oui, c’est vrai. Mais ce n’est pas la même chose. Au Wall Drug, je ne m’attendais à rien d’autre qu’un supermarché géant. A Mitchell, je savais que j’allais mettre les pieds dans un palais de maïs. Là, je voulais un peu d’authenticité. J’ai eu un supermarché géant (mais pas de maïs). D’ailleurs, cette surexploitation a menacé le statut de National Historic Landmark du site. En 2004, le National Park Service a émis des réserves et demandé des changements.
Je suis peut-être un peu dur. Si vous voulez une reconstitution, des acteurs déguisés en cowboys et en saloon girls, des tonnes de magasins qui refourguent des babioles made in China au milieu de l’art indien et des habits de cowboys, Tombstone peut suffire. Il y règne tout de même une ambiance agréable. Mais pour renifler un peu ce far-west, préférez la charmante Bisbee (moins spectaculaire mais très jolie), à quelques kilomètres, ou bien Bodie, la ville fantôme, en Californie. Enfin, c’est mon avis.
Un truc qu’on a raté
Le plus grand rosier du monde est à Tombstone (740 m2 et un tronc de 3,7 m de circonférence), inscrit au Guinness Book bien sûr. Il est au Rose Tree Inn Museum & Gift Shop à l’angle d’E Toughnut et de la 4e rue. Voir Tripadvisor pour quelques photos.
Le coin pratique
> Comment aller à Tombstone ? Tombstone se trouve sur la route 80 à mi-distance entre Benson (la sortie sur l’I-10) et Bisbee.
> Temps de trajet
Benson – Tombstone : 27 minutes
Bisbee – Tombstone : 25 minutes
Tucson – Tombstone : 1h15
> Boothill Graveyard, 408 N Highway 80. Donations appréciées (3 dollars ou plus) pour avoir le petit guide des tombes. Le site : http://www.boothillgraves.com/
> Bird Cage Theatre, 535 E Allen St. Ouvert de 8 h à 18h. Entrée : 10 dollars par tête (9 pour les enfants et les seniors, vous apprécierez la différence). Le site : http://tombstonebirdcage.com/
Pour aller plus loin
Nos autres chroniques sur l’Arizona
-
C’est vrai que ca a l’air d’un parc d’attractions à ciel ouvert ou tout est un peu fake… Moi j’ai tellement envie d’aller à Bodie!
Comments